Autrice : Claire Etcherelli
Genre : littérature française, contemporain
Paru en 1973
288 pages
Prix Femina 1967
Lu pour les #68premieresfois
Sur l'invitation de son frère Lucien, Élise, se rend à Paris. Cherchant du travail, la Bordelaise va à l'usine où celui-ci travaille et s'impose à l'embauche face à tous les Arabes. Elle y rencontre Arezki, un ouvrier algérien avec qui elle se liera au détriment des préjugés.
Elise vit avec sa grand-mère et son petit-frère Lucien. Elle l'aime et sacrifie son enfance, son adolescence pour l'élever. Lucien, en grandissant,se révèle être un rêveur qui rêve d'une utopie alimentée par les luttes de l'époque. Il décide de quitter sa région bordelaise pour rejoindre Paris et vivre la vraie vie dont il a tant de fois parlé à Elise. Quelques mois après, Elise le rejoint pour quelques jours, quelques semaines et finalement quelques mois. En pleine guerre d'Algérie, elle découvre de ses yeux ce qu'elle avait lu jusqu'à présent dans la presse. Obligée de travailler pour subvenir à ses besoins et à ceux de son frère, elle rejoint les rangs ouvriers d'une usine d'automobile. Ce travail va modifier sa façon de voir le monde et va lui ouvrir les yeux sur la politique et le racisme ambiant et va bouleverser ses convictions...
Avec ce roman, je découvre une plume qui m'a touché par sa sensibilité autant que par le regard aiguisé presque sociologique d'une époque par une autrice. Claire Etcherelli décortique le contexte particulier de la guerre d'Algérie, en France, en province comme dans la capitale, et utilise Elise pour à la fois dénoncer le racisme ambiant, mais parler d'une vie d'ouvrière dans à la chaîne, des cadences infernales, du manque d'humanité porté par ces entreprises qui en veulent plus avec moins.
Mais Elise ou la vraie vie est également un magnifique roman d'amour entre deux personnages qui viennent d'horizons différents, ont des cultures différentes et qui veulent vivre leur histoire au grand jour sans danger. Elise se rend vite compte que l'amour n'est pas acceptée pour tout le monde et que la société est une plus grande machine à broyer que les cadences infernales de l'usine automobile qui l'emploie où elle y voit l'humanité, la solidarité comme le rejet de l'autre - pour son origine ou son genre.
En bref, ce livre fut pour moi un petit coup de cœur. J'ai été transportée par l'histoire et par les personnages, notamment celui d'Elise, personnage principal du roman, qui cherche à vivre la vraie vie tant de fois évoquée et promise par son frère, Lucien. Je ne peux que le conseiller aux lecteurs qui aiment les récits habiles, sensibles et qui font naître la révolte dans les cœurs. Merci les #68premieresfois pour cette belle découverte.
- Tant pis pour la vraie vie. Et qui sait si elle n'était pas ici dans les longues rêveries, dans l'attente et le désir d'ailleurs ? p. 56
- - [...] Vous voulez les secouer avec les souffrances des Algériens ? Il faut leur parler de ce qui leur est sensible. Un petit jeune qui tombe en Algérie, ça va faire du bruit ; demain, le même sort les attend, eux ou leur fils, leur frère. La sensibilité parisienne est un phénomène de courte durée. On peut soulever toute la ville pour secourir les clochards si les clochards sont à la mode, on peut aussi la soulever contre une guerre, une injustice, mais la vague retombe vite. p. 114
- - Si le bicot n'existait pas, on inventerait quelqu'un d'autre. Comprenez, face à l'Arabe, ils s'affirment. Ajoutez l'ignorance, l'inculture, la peur, de ce qui ne vous ressemble pas, la guerre par là-dessus... p.241
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