[ Ce qu'elles disent de Miriam Toews ]


Autrice : Miriam Toews

Nationalité : Canadienne

Traduit par Lori Saint-Matin & Paul Gagné

Genre : littérature anglophone, contemporain, fait de société

Editions Buchet Chastel

Paru en août 2019

240 pages




Colonie mennonite de Molotschna, 2009.

Alors que les hommes sont partis à la ville, huit femmes – grands-mères, mères et jeunes filles – tiennent une réunion secrète dans un grenier à foin. Depuis quatre ans, nombre d’entre elles sont retrouvées, à l’aube, inconscientes, rouées de coups et violées. Pour ces chrétiens baptistes qui vivent coupés du monde, l’explication est évidente, c’est le diable qui est à l’œuvre. Mais les femmes, elles, le savent : elles sont victimes de la folie des hommes. Elles ont quarante-huit heures pour reprendre leur destin en main. Quarante-huit heures pour parler de ce qu’elles ont vécu, et de ce qu’elles veulent désormais vivre. Analphabètes, elles parlent un obscur dialecte, et ignorent tout du monde extérieur.

Lu en lecture commune il y a quelques mois avec @Madame.tapioca et livre offert par @sionbouquinait, je dois dire que je n'aurais sans doute pas lu ce roman sans cette convergence, enfin pas terminé surtout. 

Miriam Toews, dans ce roman, s'inspire d'un fait divers sordide qui a touché les femmes d'une colonie mennonite en 2009. En effet durant quatre ans, les femmes et les filles de la communauté se sont réveillées rouées de coups et violées. Pour cette communauté religieuse, il s'agit de l'intervention du diable qui punit les femmes. Mais elles finissent par découvrir qu'une partie des hommes de cette communauté les droguaient, les tenaient endormies pendant qu'ils se livraient au pire sur elles. 

Histoire de la folie d'une population qui vit en marge, histoire des hommes qui partout en tout temps prennent des droits sur les femmes, sur leurs corps. Alors, ces femmes, profitant du départ des hommes pour vendre des animaux, se réunissent en une assemblée pour décider s'il faut partir, rester ou se venger. August, colon instituteur et mis à l'écart de la vie mennonite par les autres, est chargé de faire le compte rendu de cette réunion. 

Le roman aurait pu me plaire si August ne prenait pas tant de place dans le compte rendu de cette rencontre. En effet, il digresse sans cesse, il fait des raccourcis, il explique et on peut dire qu'il coupe la voix de ces femmes qui sont déjà si peu écoutées dans leur quotidien. Alors, forcément j'ai trouvé que ces interventions multiples sont mal venues, m'ont agacé et m'ont totalement fait me détacher du récit de ces femmes. 

Cependant, Miriam Toews, elle-même menonnite, nous raconte ces communautés, nous raconte ce qui fait leur quotidien, leur organisation et la place qu'on laisse à chacun. En cela, c'est intéressant de découvrir ces colonies qui vivent différemment de nous, de voir leurs convictions, leur foi et l'impact qu'elles ont sur tout leur quotidien, sur leur organisation comme sur les relations sociales qu'ils entretiennent entre eux et avec l'extérieur.

En bref, un roman sur les femmes mais conté par une voix d'homme qui ne cesse de tout rapporter à lui. Du coup, ça m'a totalement fait sortir de l'histoire et ça m'a fait plus enragé qu'autre chose. 


p. 71

Nous sommes des femmes sans voix, répond Ona avec calme. Nous sommes des femmes en dehors du temps et de l’espace, privées de la langue du pays dans lequel nous vivons. Nous sommes des mennonites apatrides. Nous n’avons nulle part où aller. Les animaux de Molotschna sont plus en sécurité que les femmes dans leurs foyers. Nous, femmes, avons toutes des rêves, donc, oui, bien sûr, nous sommes des rêveuses. 

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