[ Ma vie de cafard de Joyce Carol Oates ]

Autrice : Joyce Carol Oates

Nationalité : américaine

Traduit par Claude Seban

Genre : contemporain, littérature américaine

Editions Points

Paru en octobre 2021

480 pages

Lecture commune


Au cours des années 1990, dans l’État de New York, Violet Rue Kerrigan, 12 ans, dénonce ses grands frères qui ont tué un jeune Afro-américain dans un accès de violence raciste. Sa famille, d’ascendance irlandaise, ne lui pardonne pas d’avoir entraîné leur arrestation. Violet est alors bannie de chez elle.


Joyce Carol Oates a le don pour écrire des histoires sombres qui suintent le malaise. Je l'avais déjà constaté à la lecture de ses romans : Zombi et Viol, une histoire d'amour. Mais là, j'ai trouvé qu'on était encore un degré au-dessus ! 

Tout s'enchaîne très vite pour notre jeune Violet quand elle témoigne contre ses frères pour l'assassinat d'un jeune noir de son lycée. Mise à la porte par sa famille, elle finit par habiter chez sa tante dans l'attente du procès et du pardon de ses parents. 

Voilà pour le début de l'histoire mais celle-ci va bien au-delà puisqu'il arrive des choses à Violet. Ici, Joyce Carol Oates livre un récit poignant qui suscite à plusieurs reprises un certain malaise que ce soit dans sa dénonciation du racisme mais aussi du sexisme ancré dans la société américaine. Au passage, on y lit aussi une fervente critique de la religion catholique, de l'acte de confession à la culpabilité et du pardon. 

Je ne sais trop quoi en dire car l'autrice nous plonge dans la tête de Violet, une jeune fille innocente au début du roman qui marquée par cette histoire, va changer au fil des années. Si le thème ainsi que l'écriture (la traduction y est sans doute pour quelque chose aussi) m'ont plu, j'ai quelques fois été perdue d'un chapitre à l'autre à cause du changement de focalisation ou bien à cause de procédés stylistiques volontairement mis là pour nous perdre : des analepses et prolepses. Malgré tout, je retiens de cette lecture cet énorme malaise qui m'a fait m'arrêter de nombreuses fois notamment à cause du vide et du manque d'émotions de Violet qui vit les choses avec un manque flagrant d'empathie … mais en même temps, si on avait vécu ce qu'elle avait vécu, en aurions-nous ? 

En bref, une lecture intense, sombre et dérangeante. Je comprends que l'autrice soit connue et reconnue dans le monde entier tant elle a ce quelque chose dans la plume qui parvient à atteindre son lectorat et à créer quelque chose qui fait qu'on se souvient de ses romans, en plus des thèmes exploités qui sont tout autant marquant durablement. Qu'on aime ou qu'on n'aime pas, le livre laisse une empreinte. 

P27 : 

Papa ne parlait du Vietnam qu'avec d'autres anciens combattants. Il connaissait quelques vétérans du Vietnam, de Corée et de la deuxième guerre mondiale, qu'il retrouvait autour d'un verre mis qu'il n'invitait jamais chez nous ; notre mère ne connaissait pas leurs femmes, et notre père ne se souciait pas de la leur présenter. Taverne, bars, pubs, relais routiers…c'étaient dans les endroits de ce genre que se retrouvaient des hommes comme Papa, un environnement presque exclusivement masculin, décontracté et convivial. Là, ils regardaient des matchs de boxe, de base-ball ou de football américain à la télévision. Ils beuglaient de rire. Ils fumaient. Ils buvaient. Personne ne les réprimandait pour leur consommation d'alcool. Personne n'écartait la fumée de son visage en prenant un air pincé. Qui aurait voulu des femmes dans un endroit comme celui-là ? Les femmes compliquaient les choses, vous gâchaient le plaisir, du moins les femmes qui étaient des épouses. 

p. 82 : 

Tout ce que je désirais alors, c'était rester étendue dans le noir, ne voir personne, n'avoir ni à parler ni à écouter parler. Ne pas avoir à penser à des choses pénibles ou effrayantes. 

P170 : 

C'est la grande faiblesse : vouloir être aimé. Vous abandonnez toute fierté quand vous voulez être aimé. 

Commentaires

  1. J'avoue ne jamais avoir lu de romans ce cette autrice mais d'en avoir beaucoup entendu parler ! J'ai, il me semble, un roman d'elle dans ma PAL, Hantises... il faudrait que je tente à l'occasion et voir si ce titre est aussi malaisant que celui que tu viens de lire ! ^^ En tout cas, il est très intrigant !

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    1. Je pense que ça m'a tout même mis moins mal à l'aise que les réécritures des contes de la collection des contes interdits ^^ Merci pour ton passage ici =)

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  2. Les personnages dénués d'émotions déstabilisent souvent mais comme tu le soulignes, en fonction de ce que l'on vit, cela peut s'expliquer... Dans tous les cas, ce roman semble ne pas laisser indifférent.

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  3. Je connais l'auteure uniquement de nom, et ce que tu dis m'intrigue autant qu'il me ferait fuir. 😇 Le manque d'empathie et les techniques pour perdre le lecteur, ca aurait de quoi m'effrayer mais apparemment l'écriture vaut le coup d'œil. Pourquoi pas, si je peux l'emprunter en bibliothèque et faire l'expérience, à voir !

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